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un signe très evident d’abondance d’argent plus grande qu’elle n’a autrefois esté.

Il y a encores deux autres causes de la dite abondance, dont l’une est la banque de Lyon34, du profit de laquelle les Luquois, Florentins, Genevois, Suisses et Allemans affriandez, apportent une infinité d’argent et d’or en France ; l’autre cause est l’invention des rentes constituées sur la ville de Paris35, lesquelles ont alleché un chacun à y mettre son argent. Bien est vray qu’elles ont fait cesser le trafic de la marchandise et les arts mechaniques, qui auroient bien plus grand cours s’ils n’estoient diminuez par ce trafic d’argent qu’on faict36. Voilà


34. C’est le cardinal de Tournon qui, en 1543, à son retour d’Italie, avoit conçu le projet de cette banque. François Ier l’adopta et, sur le conseil du cardinal, ouvrit l’emprunt à huit pour cent. (De Mayer, Galerie philosophique, t. 1, p. 144.) On ne s’en tint pas là. « Le roy François Ier, dit Bodin, commença à prendre l’argent à huict, et son successeur à dix, puis à seize, et jusques à vingt pour cent, pour sa nécessité. » Jugez dès lors de l’empressement des Italiens à venir verser leur argent dans cette caisse, par préférence à toute autre.

35. Les rentes constituées sur la ville de Paris montoient alors, selon Bodin, à trois millions trois cent cinquante mille livres tous les ans.

36. Mêmes réflexions dans le discours de J. Bodin, mais appuyées d’exemples : « Vray est, dit-il, avec une sûreté de raison dont du Haillan n’a fait que s’inspirer et qui seroit bonne encore à écouter aujourd’hui, vray est que les ars mecaniques et la marchandise auroient bien plus grand cours, à mon advis, sans être diminués par la traficque d’argent qu’on fait ; et la ville seroit beaucoup plus riche si on fai-