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La Faiseuse.

tacher aux maximes vulgaires, et ne sommes pas nez pour estre esclaves de ces petites formalitez que le commun observe. Aussi ay-je voulu m’en affranchir en cette rencontre ; et, connoissant desjà votre belle humeur et votre bonté, j’ay cru que vous ne seriez pas faschée que la bonne faiseuse de mouches prist la liberté de vous ecrire et de vous en envoyer de sa façon. J’appris mesme, il y a quelque temps, que quelques uns de vos galants de Toulouse en avoient donné à mademoiselle votre sœur sans vous en faire part, et je ne sceus pas plus tost cette nouvelle que je resolus de vous en envoyer de plus belles et de meilleures que les siennes, car nous en avons à tout prix et pour toute sorte de gens. J’en ay en mon particulier de toutes les façons,

Pour adoucir les yeux, pour parer le visage,
Pour mettre sur le front, pour placer sur le sein,
Et, pourveu qu’une adroite main
Les sçache bien mettre en usage,
On ne les met jamais en vain.
Si ma mouche est mise en prattique,
Tel galant qui vous fait la nique,
S’il n’est aujourd’huy pris, il le sera demain ;
Qu’il soit indiférent ou qu’il fasse le vain,
À la fin la mouche le pique.

Au reste, Mademoiselle, ne vous imaginez pas que mes mouches ne soient diferentes que par la taille ou par la figure ; elles ont en particulier des qualitez qui les font distinguer les unes des autres ; et je vous adverty que parmy celles-ci l’on y trouve de fines mouches, et que toutes ensemble ont l’in-