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institué heritier par egalles portions avec mon deffunct père. Il luy reste autant de bien que mon dit père m’en avoit transmis. J’ay ceste obligation à sa brayette, qui n’a jamais recogneu autres loix que celles de la nature, ny voulu avoir rien à demesler qu’en public, par crainte de cocuage ou autrement, qu’elle ne l’a point fait père d’aucuns enfants legitimes. Le bon homme m’a souvent protesté que ses veues ne s’estendoient point sur un heritier estranger ; qu’au contraire il partiroit très contant de ce monde de m’avoir fidellement rendu ce qu’il avoit si longtemps avec tant de soin gardé en depost ; il adjoustoit, pour un supresme tesmoignage de la bonne volonté qu’il avoit pour moy : Je t’en souhaitte, mon nepveu, la possession plus tranquille et aysée que je ne l’ay eue avec tout le bon mesnage que j’y ay sceu apporter, et le siècle auquel tu me survivras moins remply de malice, de corruption et de confusion que celuy-cy. Or, Sire, c’est maintenant à moy d’assembler en consultation tout ce qu’il y a dans mon cerveau de bon sens et de raison pour deliberer si, mon oncle decedant en ceste volonté, je dois recueillir sa succession ou la donner en proye au premier occupant, ne plus ne moins que les despouilles d’un pestiferé : car, pour ne mentir point, s’il me falloit estre exposé à tant d’accidans qui m’ont traversé par le passé, j’y renonce très volontiers. Or ne voy-je rien qui m’en puisse exempter, les choses demeurant en mesme etat. J’aymeray tousjours à faire chère lie, n’estraissir mon ventre ny faire trefves de machoires ou du poignet au gré des collecteurs, fermiers ou commissaires ; cependant les