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mandier le brevet, je suis très asseuré que j’en serois esconduit. Si puis-je dire avec verité que tel a aujourd’huy plus d’escus de pension que son père n’avoit de sols vaillant, qui ne l’a pas mieux merité que moy. Je ne me laisse pas emporter à des desirs si deraisonnables ; encores moins vous demanderay-je une notable somme, au moyen de laquelle il me feust aysé de bondir de ce bourbier de misère où je suis bien avant plongé, ou, pour mieux dire, enfoncé. Vos finances sont assez espuisées sans qu’il soit besoin de les divertir à ces liberalitez ; ceste royale vertu de beneficence27 sera de raison en quelque autre siècle. Je ne suis pas abillé en homme qui se presente pour impetrer de Vostre Majesté la creation et octroy d’un nouvel office. Pleust à Dieu eussiez-vous mis au billon28 et refondu tous ceux qui sont en vostre royaume ! Si vous agreez que je parle un peu librement et donne la bonde à la bonne foy à ce qui me reste sur l’ame, vous sçaurez que j’ay encores un oncle, aagé de quatre-vingt-dix-sept ans un mois et quelques jours, qui fust par son père, mon ayeul,


27. Le mot bienfaisance n’étoit pas encore fait. Balzac le créa, mais l’abbé de Saint-Pierre, qui fit sa fortune, passe pour l’avoir trouvé.

28. C’est-à-dire mis au rebut, comme on faisoit des pièces d’argent démonétisées. C’étoit une locution très en usage. Quand, sous ce même règne, on fit une première recherche de la noblesse, ce fut l’expression dont on se servit pour les gentilshommes que cet examen frappa de discrédit. Claveret fit à cette occasion une très curieuse comédie en cinq actes, en vers : L’Escuyer, ou les Faux nobles mis au billon, 1629, in-8.