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d’entr’eux, me tirant par la manche, me porta parole d’amour de la part d’une damoiselle, femme, ainsi qu’il disoit, à un des archers de vostre corps, sur le cœur de laquelle j’avois faict rejaillir, sans penser en mal, un traict de mon amour, urinant au dessous de sa fenestre13. La bonne opinion en laquelle, Dieu graces, j’ai tousjours eu ma personne, m’obligea non seulement de le croire, mais de m’en imaginer au double de ce qu’il disoit, et mon bon naturel de luy aller faire promptement exhibition de ma gentillesse. Pour n’estre importun à Vostre Majesté, je tairay ce qui se passa de menus entretiens entre nous ceste première journée et les suivantes : tant y a que je demeuray aussi satisfaict de ceste cognoissance qu’un escolier balotant à credit, d’autant que la damoyselle refusa un present de deux pistolles que je luy voulus faire. Ce calme dura jusques au jour fatal que je trouvay la suppliante toute esplorée, mau-


tomboit sous la main, de perdre un peu d’abord pour gagner tout ensuite. Nous avons déjà vu une partie de ce genre (V. t. 3, p. 273). Le nom de marchands de chair humaine qu’on donne ici à ces drôles nous feroit penser qu’ils exerçoient aussi déjà le métier de racoleurs, qui, au XVIIIe siècle, rendoit le passage du Pont-Neuf et le voisinage des fours du quai de la Ferraille si dangereux pour les Nicaise de la province. V. le Tableau de Paris de Mercier, ch. 50, et le Supplément aux Essais sur Paris, par Saint-Foix neveu, t. 1, p. 170.

13. Nous trouvons dans les Dames galantes de Brantôme, Discours 2, édit. Garnier, p. 171, l’histoire d’une grande dame qui s’enamoura de cette manière « d’un grand cordonnier, estrangement proportionné ».