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tions chatouilleuses de son art11, ou bien qu’ils soient obligez d’avoir tous les mois chacun une chaude pisse cordée ? On auroit autant de raison de les appeler tonneliers ou officiers du Port-au-foin, pour ce que, si les pretendus cordonniers font des bottes de cuir, ceux-cy en font de bois et de foin. J’aimerois autant dire qu’ils feussent maitres d’escrime : les escrimeurs tirent des bottes, et les cordonniers les chaussent. Voilà une impertinence plus claire que le jour ; voilà une improprieté tout-à-fait manifeste, sans l’affront signalé que reçoit nostre langue françoise de dire qu’elle soit si pauvre, qu’il faille qu’elle emprunte le nom d’une autre profession pour baptiser ces messieurs de faiseurs de soulis. Et semble que l’italien aie rencontré aussi mal que le françois en ceste affaire icy, quelque affectation et mignardise qu’il puisse pretendre dans la delicatesse et douceur de son langage : il nomme un souly scarpa12 et celuy quy le faict calzonaro, ny plus ny moins que s’il estoit chaussetier et que sa profession fut de faire des bas ; parce qu’en effet des bas de chausse, aussy bien en Toscane qu’en autres lieux d’Italie, s’appellent cal-



11. Jean Guillaume étoit le bourreau de Paris. Il avoit succédé à Jean Rozeau (V. notre t. 4, p. 251), qui avoit été pendu sous Henri IV pour avoir, pendant la Ligue, étranglé le président Brisson, lui avoir pris son manteau de peluche et l’avoir vendu dix écus. V. L’Estoille, édit. Michaud, t. 2, p. 75, etc.

12. Ce mot italien, qui venoit lui-même du latin carpus ou de son diminutif carpisculus, qui désignoit une sorte de soulier découpé, a eu pour dérivé, dans notre langue, son équivalent escarpin.