Page:Variétés Tome V.djvu/343

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tures barbouillées, luy respond le boulanger ; mesle-toy de vendre tes Vierges Maries borgnesses, ou de faire comme Judas en vendant Nostre Seigneur pour trente deniers. — Il faudroit donc que je te le vendisse, car tu as plus la mine d’un juif que d’un moulin à vent, dit le peintre. Un frippier11 qui avoit la teste tournée d’un autre costé creut que ce mot de juif avoit esté dit à son occasion, et, sans demander d’où venoit cette injure, s’adressa fortuitement à une harangère qu’il trouva la bouche ouverte, et, jurant par la mort et par la teste, l’appella plus de cent fois macquerelle. Est-ce à cause, luy dit-il ensuitte, que tu ne vends plus ta marée puante, depuis que nous avons permission de manger de la viande ? Te veux-tu vanger sur ceux qui n’en peuvent mais ? Mortbieu ! je t’envoyray chercher tes juifs où tu les as laissez, et te montreray que je suis honneste homme. — En as-tu tanstost assez dit ? replique l’harengère les mains sur les roignons ; jour de Dieu ! tu t’es bien adressé, guieble de receleur ! Si je vendons de la marchandise, elle est belle et bonne ; mais, pour toy, tu te donnerois au diable pour cinq sols et tromperois ton père si tu pouvois. C’est bien, mercy de ma vie ! de quoy je me mets en peine si j’ay ta pratique, ou si tu vas acheter des tripes ou de la vache aux bouchers ! Sur ce mot de bouchers, un qui estoit un peu derrière s’avança pour repliquer à


par de gros vers. C’est du moins ce qui est raconté dans une pièce du temps, La mort effroyable d’un boulanger impitoyable de cette ville. Paris, 1649, in-4.

11. Tous les frippiers passoient alors pour être des Juifs. V. notre t. 1, p. 181.