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contrainct de les refrotter des serviettes de M. du Vergé6.

Cette assemblée ne se peut faire sans apporter de la jalousie à celles qui n’en avoient esté averties, car la dame Tiennette, blanchisseuse suivant la cour, qui a succedé à la place de la grosse Martine, faisant rencontre de la petite Marie, luy demanda d’où elle venoit. Ce fut alors que l’ordre qui s’estoit tenu au bal fut bien deschiffré. La grosse Martine, bien qu’elle eust trois pieds et demy de galles sur le col, ne laissa pas d’estre grandement faschée de ce qu’elle n’en avoit pas esté advertie, à cause de sa grande prestance et du rang qu’elle tient parmy leurs compagnies à cause de son antiquité aux academies ; mais, pour la contenter, la belle Louise de la Motte luy dit : Tiennette, ne vous faschez point, il y en a encore assez pour vous et pour vostre compagnie ; je m’asseure que l’on vous aura reservé quelque chose. Incontinent elles se mirent en chemin pour aller au lieu désigné pour le bal, où, estant arrivées, trouvèrent cinq bons garçons, frais et bien dispos, pour leur apprendre les Canaries7 ;


6. C’étoit le mot consacré pour dire des verges. De là vient sans doute qu’en argot une canne de jonc s’appelle encore une serviette.

7. « Sorte d’ancienne danse, dit Compan, que l’on croyoit venir des îles Canaries, ou qui, selon d’autres, venoit d’un ballet ou mascarade dont les danseurs étoient habillés en rois de Mauritanie ou sauvages. » (Dict. de danse, p. 41.) Cette danse, avec toutes ses passades et reculades, est décrite dans l’orchésographie de Thoinot Arbeau. « Et notez, y lisons-nous, que lesdits passages sont gaillards, et néanmoins étranges, bizarres, et ressentant fort le sauvage. »