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Comme droict au soleil regarde le soucy,
Mon œil trop amoureux, qui se desplaist icy,
Jettant mille souspirs, à toute heure se tourne
Du costé de la France, où ma Blanche sejourne.

Je croy pour me tromper qu’ayant les yeux tournez
Sur le beau paradis des amants fortunez,
Que mon cœur se soulage, et qu’une douce flame,
Compagne de l’amour, vient contenter mon ame.

Ô jardins compassez de mille lauriers verts !
Beaux vergers fructueux, où je couche à l’envers !
J’ay moderé ma peine et ma douleur charmée
Au giron bien-aymé de ma deesse aymée.

Cabinets derobez, et vous petits destours,
Où nous prenions l’escart pour conter nos amours,
Lorsque sur le tapis de l’herbe la plus molle
Mille mignards baisers nous bouschoient la parolle,

Doux paradis d’amour si souvent frequentez,
Combien depuis six mois je vous ay regrettez !
Mille fois tous les jours dans mon cœur je vous conte
Le malheur qui me tue, et le mal qui me dompte.

Las ! vostre souvenir ne me sert seulement
Que d’augmenter ma peine et doubler mon tourment
Car ce fort sentiment, loing du bien qu’on desire,
Au lieu de l’appaiser, augmente le martyre.

Fin.