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gallerie du cardinal Fernèze, que l’on estime estre l’une des plus admirables pour les peintures et autres singularitez qui s’en puissent trouver dans l’Europe8.

Où, entre autre chose, l’on voit toutes les nations despeintes en leur naturel, avec leurs habits à la mode des pays, hormis le François, qui est despeint tout nud, ayant un rouleau d’etoffe soubs l’un de ses bras, et en la main droicte des cizeaux, pour demontrer que de toutes les diversitez de l’univers il n’y a que le François qui est seul à changer journellement de mode et façon, pour se vestir et habiller, ce que les autres nations ne font jamais.

Maintenant, à cause de l’alliance de la France avec l’Angleterre, incontinent vous verrez nos courtisans habillez à l’anglaise9, et par ce moyen, pour rendre leurs freizes et collets jaunes, ils seront cause qu’il pourra advenir une cherté sur le saffran, qui fera que les Bretons et les Poictevins seront contraints de manger leurs beurres blanc et non pas jaune, comme ils ont accoustumé.

Voilà, amy lecteur, ce que pour le present j’ay tracé pour un petit racourcissement sur ma toille le portrait de l’un des plus parfaits courtisans à la mode, lequel pour un peu de temps s’est absenté de


8. V., sur ce tableau, t. III, p. 242.

9. C’est au contraire le courtisan anglois qui avoit subi l’influence françoise : « Les Espagnols, écrit Malherbe à Peiresc le 19 septembre 1610, sont habillez à leur mode, et les Anglois à la notre, en sorte qu’on ne les sauroit discerner des François que du langage. » (V., sur l’histoire des modes angloises, un excellent article de la Revue britannique, 1er août 1837.)