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lui repondit qu’à ce qu’il eprouvoit, il falloit que la peste fust partout dans ces montagnes, qu’il devoit s’abandonner à la Providence, ne penser plus à la peste, et seulement au but où il tendoit : se coucha et dormit avec la même tranquillité. Cette grandeur d’âme n’etoit pas à oublier dans ce heros, si simplement, si modestement, si veritablement heros en tout genre. Quel bruit n’eût pas fait un tel trait dans ses successeurs ? Mais sa vie à luy n’etoit qu’un tissu continuel de pareilles actions, variées suivant les circonstances, qui echappoient par leur foule, et dont sa modestie le detournoit saintement d’en sentir le merite.

Or, voici le Pas de Suze4, tel que mon père me l’a plusieurs fois raconté, qui, entre autres vertus, etoit parfaitement veritable.

Les barricades5 reconnues furent estimées très difficiles, et, tôt après, impossibles à forcer : les trois marechaux6, et ce qu’il y avoit de plus distin-


4. C’est le passage des Alpes, dont la ville de Suse domine l’entrée, à la réunion des deux routes du mont Cenis et du mont Genèvre.

5. « Les diverses ruses, dit Saint-Simon dans ses Mémoires (t. I, p. 38), suivies de toutes les difficultés militaires que le fameux Charles-Emmanuel avoit employées au délai d’un traité et à l’occupation de son duché de Savoie, l’avoient mis en état de se bien fortifier à Suse, d’en empêcher les approches par de prodigieux retranchements bien gardés, connus sous le nom de barricades de Suse, et d’y attendre les troupes impériales et espagnoles, dont l’armée venoit à son secours. »

6. Bassompierre, Créqui et Schomberg.