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Sans argent ni faveur parvenir de cent ans ?
Pensez-vous, sans argent, noblesse ny doctrine,
Obtenir des estats pour vostre bonne mine ?
Que, pour friser, porter belle barbe au menton,
Un banquier vous voulust prester demy-teston ?
Vous estes de grands sots si de ces ombres vaines
Vous allez repaissant vos travaux et vos peines.
Pour faire rien de rien, il faudroit estre Dieu ;
Mais vous n’avez argent, ny sçavoir, ni bon lieu.
Tu viens accompagné des neuf muses d’Homère,
Mais tu n’apportes rien : rien l’on ne te revère :
Tu n’es qu’un Triboulet, et quand et quand pour lors
Avecques tes neuf sœurs tu sortiras dehors.
Dieu d’amour peut beaucoup, mais monnoye est plus forte ;
L’argent est toujours bon, de quelque lieu qu’il sorte.
N’esperez seulement un estat de sergent,
Si, pour vous faire tel, vous n’avez de l’argent ;
Si quartier chez le roy vostre bon heur recouvre,
Sera au Chastelet plutôt que dans le Louvre ;
Alors vous ne vivrez, n’ayant pas le dequoy
De vous entretenir, sinon du pain du roy :
Là vous n’aurez besoin de chevaux ny de guides,
Exempts de guets, d’imposts, de tailles et subsides.
Tous ces esprits falots, boufis comme balons,
Qui veulent estre grands29 de simples pantalons,
Qui le fient de porc veulent nommer civette,
Et faire un brodequin d’une simple brayette ;
Qui de l’esclat d’un pet veulent peser un cas,
Et d’un maravedis faire mille ducats ;
Tous ces dresseurs d’espoirs, ces foux imaginaires,



29. Var. : rois.