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Domine, sans conter ny l’huile ny la peine,
Les plumes, le papier, l’ancre de son cornet ;
Un sol pour degresser les cornes du bonnet,
Deux sols au savetier qui son cuir rapetasse
Un double au janiteur22 pour balier la classe,
Sans conter le barbier, qui luy pend au menton
Une barbe de boue, d’Albert23 et de Platon ;
Un pair de rudiments, un bon Jan Despautaire,
Et mille autres fatras qui sont dans l’inventaire
D’un pedant affamé comme un asne baudet,

Plus amplement à vous quæ glosa recludet.

Mais aujourd’huy l’on tient à mepris la science,
Et Fortune ne rit sinon à l’ignorance ;
Un homme bien versé, ce n’est rien qu’un pedan ;
Les asnes vont en housse, et tout est à l’encan.
La vertu sur un pied fait sentinelle à l’erte24 ;
Madame la Faveur tient par tout cour ouverte ;
Et dans les magistrats parents fourrent parents,
Ainsi que l’on entasse en cacque les harens ;
Suyvant comme poussins sous l’aisle de leur mère,
Tout va au grand galop par compère et commère ;
Le vieillard Phocion et le docte Caton
N’y ont pas du credit pour un demy-teston.
Dans ces jeunes conseils la vieillesse ravasse ;
Quelque riche bedon25, fol et jeune couillasse ;


22. Portier. D’Esternod parle ici le langage de l’escolier limosin.

23. Maître Albert-le-Grand.

24. Dans cette orthographe primitive du mot alerte on trouve son étymologie, qui vient de l’italien fare all’ erta, être au guet. Montaigne écrit : « Se tenir à l’airte. » (Liv. 1er, chap. 19.)

25. C’est-à-dire ventru. Bedon étoit synonyme de bedaine.