Page:Variétés Tome IV.djvu/14

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

esgard qu’elles sont ordinairement le travail de l’esprit et le fleau le plus violent qu’ils puissent avoir.

Quoy que j’ay parlé de mariages en diverses façons, si neantmoins je cognois que c’est une necessité à la nature humaine pour plusieurs et diverses raisons, tant pour la generation qu’autres commoditez qu’ils apportent ; mais il faut regarder premierement, pour bien et deuement choisir une femme, qu’elle soit chaste et vertueuse, venue de bon lieu, issue de parents sans reproches, bonne mesnagère, et surtout mediocre en habitz, parce que la superfluité la rend orgueilleuse et mescognoissante26, tout ainsy que ces joüeurs de tragedies, où un faquin, estant revestu, representera librement le personnage d’un roy ou empereur en gravité et audace ; de mesme elle sera hautaine, et quelques fois contraincte pour son entretient faire des metamorphoses domestiques, comme dict un poète françois en ces vers :

Du temps passé nous lisons que les fées
Firent changer d’homme en cerf Actéon,
Et maintenant ceste mutation
S’exerce encor par des nymphes coiffées.

Ceux quy se veulent marier, il faut qu’ils s’interrogent eux-mesmes s’ils sont puissans assez pour s’acquitter d’un si pesant fardeau : car de joüer après


26. C’est un mot perdu et très regrettable. Marmontel, qui tenoit pour notre vieille langue, indique par cette phrase la demi-teinte d’ingratitude qu’il faut y découvrir : « Il ne faut jamais être oublieux au point d’être méconnoissant. » (Mémoires, Paris, 1804, in-8, t. 2, p. 97.)