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Pour un morceau de bois, pour un voirre cassé.
Elle, qui n’en peut mais, porte la folle enchère,
Et sur elle à la fin retombe la colère

Et l’injuste courroux de ce fol insensé.

Ainsi de tous costez la femme est miserable,
Subjette à la mercy de l’homme impitoyable,
Qui luy fait plus de maux qu’on ne peut endurer.
Le captif est plus aise, et le pauvre forçaire
Encor en ses mal heurs et l’un et l’autre espère ;
Mais elle doit sans plus à la mort esperer.

Ne s’en faut esbahir, puis qu’eux, pleins de malice,
N’ayans autre raison que leur seulle injustice,
Font et rompent les loix selon leur volonté,
Et, usurpans tous seuls, à tort, la seigneurie
Qui de Dieu nous estoit en commun departie,
Nous ravissent, cruels ! la chère liberté.

Je laisse maintenant l’incroyable tristesse
Que ceste pauvre femme endure en sa grossesse ;
Le danger où elle est durant l’enfantement,
La charge des enfans, si penible et fascheuse ;
Combien pour son mary elle se rend soigneuse,
Dont elle ne reçoit pour loyer que tourment.

Je n’auray jamais fait si je veux entreprendre,
Ô Muses ! par mes vers de donner à entendre
Et nostre affliction et leur grand’ cruauté,
Puis, en renouvellant tant de justes complaintes,
J’ay peur que de pitié vos ames soient atteintes,
Voyant que vostre sexe est ainsi maltraicté.