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Leur fay-je pas tousjours pendre au bas des aureilles
Quelques perles de prix ou bien choses pareilles ?
La chaisne d’or au col35, aux mains les bracelets,
Au doigt les diamans, au front les affiquets,
Et autres tels fatras qui valent davantage
Que tout le revenu du bien de leur mesnage ;
Mais je ne monstre pas seulement ma vertu
Aux façons des habits dont on est revestu :
C’est moy seule qui fais desguiser leur parole.
On a beau consommer tout son temps à l’ecolle,
Il faut, quiconque veut estre mignon de court,
Gouverner son langage à la mode qui court ;
Qui ne prononce pas il diset, chouse, vandre,
Parest, contantemans36, fut-il un Alexandre,
S’il hante quelquefois avec un courtisan,
Sans doute qu’on dira que c’est un paysan,
Et qui veut se servir du françois ordinaire,
Quand il voudra parler sera contraint se taire.
Qui peut trouver un mot qui n’est pas usité
Est attentivement de chacun escouté,
Et celuy qui peut mieux desguiser son langage
Est aujourd’huy partout estimé le plus sage,



35. « Entre les femmes, il y a bien d’autres niveleries, j’entends entre les bourgeoises : celles qui ont les cheveux tirez ou la chaisne sur la robbe sont estimées davantage que les autres qui ne sont pas ainsi parées. » (Hist. de Francion, 1663, in-8, p. 260.)

36. « … Plusieurs de ce siècle… disent à tout propos chouse, souleil, etc. » (Le Courtisan à la mode,… Paris, 1625, in-8, p. 4.) V., sur cette prononciation à la mode du temps de Louis XIII, le Banquet des Muses… du sieur Auvray (les Nonpareils), et notre Essai historique sur l’orthographe, Paris, 1849, in-8, p. 52–53.