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me un fondeur de cloches, au petit pas je me retire de là, et estois assez faché de n’entrer en ce pays-là, veu la peine que j’avois eue à le chercher ; mais je vis bien qu’il n’y va pas qui veut. Ayans quitté le père Sapientia avec ma courte honte, j’aperceu neantmoins sur les limites du pays le bon père et homme de bonne memoire, Monsieur de Chavignac11, qui composoit un livre, De reconciliatione successori suo cum vicario suo antiquo, avec la glose de Belin et Sageret ; il estoit prest à l’envoyer à Patisson12, mais Monsieur de Bonport estoit engrené le premier. Il y avoit trois jours que j’en estois party quand je t’ay trouvé. — Vrayment, dit maistre Guillaume, je ne m’estonne pas de t’ouïr parler, tu as bien veu du pays. Mais quoy ! Piedaigrette, se resouvenant encores de tous les bons tours, tant bons que mauvais, qu’il avoit faits, ne pouvoit bonnement faire l’accolade à maistre Guillaume, lequel, d’un visage à demy fasché, luy dit : Il semble, à te voir, Piedaigrette, que tu aye le cœur failli ; tien une tranche de ce jambon, que m’a fait bailler Monsieur de Saint-Paul13, passant par son cartier. Piedaigrette, revenant com-


11. C’est le docteur en théologie Chevignard ou Chevigny, le même au sujet duquel s’est trompé Du Verdier quand il en a fait deux personnes, Jean de Chavigny et Jean-Aimé de Chavigny. Il semble qu’il est fait allusion ici au livre qu’il fit sur l’avénement de Henri IV, Henrici IV fata, Lyon, 1594. Il mourut en 1604, âgé de plus de 80 ans.

12. Mamert Patisson l’imprimeur.

13. Sans doute le capitaine Saint-Paul, qui commandoit à Reims, et fut tué par M. de Guise pour quelques paroles trop hautaines. V. L’Estoille, 28 avril 1594.