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Le moyen de cognoistre les filous d’une lieue loing sans lunettes.

Premierement, il faut que vous sçachiez qu’ils ont un nez, une bouche et deux yeux comme un autre homme, et partant il n’est point difficile de les trouver. On en rencontre partout, et ressemblent mieux à un singe qu’à un moulin à vent ou à un fagot : toutes leurs actions sont vrayes singeries ; mais ne leur baillez jamais la bourse à garder, car ils savent fondre l’or et l’argent, et sont les plus grands alchimistes du temps present, du passé et de l’advenir. Quand vous verrez un Allemand contrefaict, un homme bigarré comme un valet de carreau ou le roy de picque, un maquereau, un minois du Palais, un joueur de dez, un chercheur de repuë franche, un poète qui prend les vers à la pipée, un entreteneur de dames, un homme de chambre botté, fraisé comme un veau, gaudronné comme un singe16 ; un laquais vagabond, un joueur de tourniquet, un faiseur de passe-passe, Jean des Vignes et sa sequelle17, un sauteur, un plaisantin, un Gascon sans


16. Par raillerie, les montreurs de bêtes savantes habilloient leurs chiens et leurs singes à l’espagnole, avec larges fraises gaudronnées (voy., sur ce mot, notre tome 1er, p. 163). Une vieille enseigne de Paris représentoit un de ces magots ainsi accoutré, avec cet affreux calembour pour légende : Au singe en batiste.

17. V. sur ce joueur de farces, qui faisoit partie de la se-