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Et je me trouve icy tellement combattu,

Que je tombe par terre et n’ay plus de vertu.

Puissante deité, mon vainqueur et mon maistre,
Si tu m’as autrefois advoué pour ton prestre,
Si jamais tu m’as veu, plus qu’aucun des mortels,
Espandre, au lieu d’encens, du vin sur tes autels,
Race de Juppiter, digne enfant de Semèle,
Appaise la fureur qui m’accable soubs elle,
Dissipe les vapeurs de ce bon vin nouveau
Qui tempeste, qui boult au creux de mon cerveau ;
Rends plus fermes mes pas, modère ta furie ;
Donne-moy du repos, ô père ! je t’en prie
Par ton thyrse, couvert de pampres tousjours vers ;
Par les heureux succès de tes travaux divers,
Par l’effroiable bruit de tes sainctes orgies,
Par le trepignement des Menades rougies,
Par le chef herissé de tes fiers leopars,
Par l’honneur de ton nom, qui vole en toutes parts ;
Par la solemnité de tes sacrez mystères,
Par les cris redoublez des festes trietères9,
Par ta femme qui luit dans l’Olympe estoillé,
Par le bouc qui te fut autres fois immolé,
Par les pieds chancelans du vieux père Siléne ;
Bref, par tous les appas de ce vin de Surêne10.



9. Les Triétérides étoient les fêtes licencieuses qui se célébroient tous les ans dans la Béotie et dans la Thrace en souvenir de l’expédition de Bacchus dans les Indes.

10. Il faut dire, à la gloire de ces buveurs, qu’il ne s’agit point ici du vin de Suresnes près Paris, mais d’un autre, à peu près du même nom, dont le Vendômois Musset-Patay a expliqué ainsi la faveur assez passagère dans une note de sa