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d’une eglise, avec trois ou quatre enfans : voylà une de ces pauvres glorieuses.

Si c’est la fille de quelque vendeuse de lunettes, et qu’elle demeure chez quelque bon marchant, elle a bien moyen de ferrer la mule, car sa maistresse est tousjours au contoir ; elle sera six mois à faire la bonne menagère, après elle se frotte au pillier, c’est encore pis que les filles de chambre et de cuisine ; elles s’amuseront à faire comparaison au maistre du logis, ou bien au fils du logis, ou à quelques garçons de la boutique, et la maistresse, voyant tout cela, luy donne son sac et ses quilles. Et ma pauvre fretileuse sera deux ou trois mois sans trouver condition ; elle mangera tout son fait jusques à ses habits. Il faut aller aux recommandaresses8 pour trouver condition, quelquefois trois semaines sans rien trouver, et ce passer à manger pour un sol de pain et boire de l’eau tout le saoul : voilà ma petite trotteuse bien esbahie. Quelquefois elles seront bienheureuses de demeurer chez quelque cordonnier ou savetier. Ont-elles passé l’hiver de la façon, ont-elles deux ou trois escus, il faut avoir une cotte et quelque meschante hongreline à la fripperie, et de là chercher quelque meilleure condition. Sont-elles r’adressées à quelque bonne maison, ils ne se souviennent plus du mauvais temps ; elles sont plus glorieuses que jamais, et ferrer la mule comme il faut et amplir leur bource ; après il viendra quelque compagnon cordonnier, tailleur, serrurier, ou savetier, ou marechal, pour luy faire l’amour ; vous luy


8. V., sur ce mot, notre tome 2, p. 237–238.