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força des premières à dire : La patience surmonte toute chose. Je cognois bien le personnage ; pour mon particulier, je ne m’en soucie guères, car nos maîtresses ne sont pas si depourveues de jugement de croire tout ce qui se publie contre nous, car le papier est aussi doux qu’une fille de seize à dix-sept ans. Tous ces discours ne me soucient pas tant que je me soucie que le jour de la chaire Saint-Pierre je perdy vingt et deux quarts d’escu à la blanque : j’allois pour acheter du linge et pour me faire une hongreline1 ; je ne reportay qu’une boete peinte qui vaut bien cinq ou six sols.

Une autre de la rue de la Cossonnerie dit : Il ne faut pas aller si loin pour perdre son argent. Samedy dernier je passay sur le pont de bois2 : un petit fripon disoit avoir trouvé une bague d’or avec un mancheron3, où il y avoit une blouque de cuivre doré. Je croyois avoir pris la mère au nid ; le tout me couste neuf quars d’escu et demy, et je refuze douze sols du mancheron et deux carolus de la bague : n’est-ce pas une bonne journée

Sur ce propos, vint Marion Soufflé, qui demeure


1. C’étoit une camisole à longues basques, comme celle que portent les Hongroises.

2. Sans doute le Pont-Rouge ou Pont-Barbier, qui se trouvoit en face de la rue de Beaune. En 1636, il n’étoit établi que depuis quatre ans. Sa frêle charpente ne résista pas plus d’un demi-siècle. Après avoir été souvent ébranlé, et même à demi détruit, il fut emporté par la débâcle de 1684. V. Lettres de Sévigné, 1er mars 1684.

3. Sans doute un petit manchon s’attachant par une boucle à la ceinture.