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trées. Ainsy on peut dire que le lieu naturel des filles de joie à Paris est les marests du Temple et le fauxbourg Sainct-Germain2, comme le vray lieu de la comedie est l’hostel de Bourgongne.

Cela supposé, on peut dire aussy que chaque chose a sa proprieté, comme les pistaches ont la vertu d’eschauffer au huictiesme degré, les cervelas et les langues parfumées d’alterer au dernier poinct, le vin blanc de faire pisser, le pavot et le vin muscat d’endormir merveilleusement, et la beauté de charmer.

Par la mesme raison chaque chose a aussy son temps : il y a un temps pour coudre et filer, temps de manger et de boire, temps de chanter et de dancer, temps de pleurer et de rire, qui est premierement le temps de ceste quinzaine grasse. Or il faut croire que quand une chandelle se veut esteindre elle jette une plus grande flamme, ce quy est un presage de sa mort ; aussi il semble que, par une antiperistaze des jours maigres quy approchent, les jours gras se renforcent et rassemblent toute la joie quy est esparse le tout au long et au large de l’année. C’est donc avec juste raison que toute l’antiquité a destiné ces jours aux plaisirs, à la volupté et aux ris.

Mais, pour vous faire rire, que pourroit-on vous representer maintenant ? car, selon l’ancien proverbe, il ne se dit rien à ceste heure quy n’ait esté dit. Et


2. V., sur le grand nombre des courtisanes au Marais, notre volume de Paris démoli, 2e édit., p. 33 et 320, et, sur celles du faubourg S.-Germain, notre premier volume des Variétés, p. 207, 219.