L’autre, faisant l’habile aux choses de la court,
Mettra devant les yeux que l’argent est bien court
Pour en donner aux muses.
Les museaux neantmoins en ont plus qu’il ne faut ;
Mais c’est le temps des buses,
Qui met les esperviers et leur chasse en deffaut.
Les rois ont en l’esprit (digne de grands objets)
Les affaires d’Estat ; mais les autres subjects
N’obligeant leur memoire,
C’est aux inferieurs à leur r’amenteveoir
En faveur de leur gloire,
Comme au nom de la muse ils le firent sçavoir.
Ronsard vivoit alors, Saincte-Marthe et Baïf,
Et Garnier, et Belleau qui parut si naïf ;
Et toutesfois Desportes,
De Charles de Vallois, estant bien jeune encor,
En de telles escortes,
Eut pour son Rodomont huict cents couronnes d’or3.
Je le tiens de luy-mesme, et qu’il eut de Henry,
Dont il estoit alors le poëte favori,
Dix mille escus pour faire
Que ses premiers labeurs honorassent le jour
Sous la bannière claire4
Et desous les blasons de Vénus et d’Amour.
3. « Son Rodomont, autre imitation (de l’Arioste) qui n’a guère plus de sept cents vers, lui étoit payé plus de 800 écus d’or, de ces écus dits à la couronne : plus d’un écu par vers. » Sainte-Beuve, Tableau historique et critique de la poésie françoise au XVIe siècle, Paris, Charpentier, 1843, in-12, p. 423 (art. sur Desportes).
4. Brossette mentionne, dans une de ses notes sur la sa-