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palombes, de tourterelles, de grives, de levraux, que non pas ceux d’un bœuf, d’une vache, d’un pourceau, d’une truye, d’un bouc, d’une chèvre et autres bestes puantes, grossières et massives ? Baste, baste, in parvis virtus, in magnis virus. Par comparaison, qu’on demande à quelque pucelle de vingt ans estant à table : M’amye, voulez-vous manger de ces fricandeaux ? de ces petits gougeons ? de ces lamperons ? de ces loches frites6 ? de ces barbillons ? de ces soles à la gibelote ? de ces brochetons ? de ces grenouilles à la saulce blanche ? Sage et civilisée, elle respondra : Un petit, s’il vous plaist, monsieur. Je remets à vos jugements quelle grace si elle disoit : Les plus gros et les plus longs me sont les meilleurs. Quid magis ? Si quelque amoureux, pour favoriser sa maistresse et parvenir au but de ses bonnes graces, luy présentoit un bouquet composé d’une fleur de pavot, de chardon, d’herbe au soleil, de lys champestre, avec une feuille de choux ou de boüillon blanc à l’entour, se rendroit-il pas ridicule et stupide par devant les plus idiots de sa jurisdiction ? Comment agencerons-nous donc ce bouquet pour sa grace et perfection ? Avec une fleur de violette, de giroflée, de pensée, de jasmin, de jacinthe, de narcis, de paquerette, d’œillets, de boutons de rose, avec le myrthe plus petit et la marjolaine plus fran-


6. C’étoit la friture à la mode depuis que Henri IV, pour répondre à cette rodomontade de l’ambassadeur d’Espagne : « Votre Paris danseroit dans notre Gand », lui avoit dit : « J’ai une Loche (il parloit de cette ville de Touraine et de sa grosse tour) si grosse et si grande que tout le beurre d’Espagne ne suffiroit pas pour la frire. »