Nous aurions déſiré pouvoir éclaircir ces faits qui nous ont paru dignes de la plus grande curioſité : il ſeroit ſans doute utile d'examiner plus particulièrement cette partie colorante qui ſe tire de la Farine des Pommes de terre, & ne peut s'enlever qu'après le ſixième ou ſeptième lavage, & prononcer ſi elle mérite les craintes qu'elles a données à l’Auteur de la Lettre ; mais vous ſentez aiſément, Meſſieurs, combien ce travail auroit retardé une réponſe que votre empreſſement pour le bien public, ne vous permettoit pas de différer auſſi long-temps que l’auroit exigé cette recherche.
Privés des lumières qu'aurait pu fournir une analyſe exacte de cette matière colorante, nous aurons recours à l’expérience, ce grand Maître dans l’Art que nous profeſſons.
Si les impuretés verdâtres que l’Auteur cherche à enlever par le lavage réitéré de la Farine des Pommes de terre, étoient nuiſibles, comment ne s'en ſeroit-on pas apperçu par quelque dérangement dans la ſanté du grand nombre d'adultes, & ſur-tout d'enfans qui en font un uſage journalier ? Pourquoi, depuis que cet uſage eſt devenu ſi commun, aucun Auteur n'a-t-il parlé d'accidens que l’on dût attribuer à la qualité vicieuſe de ces impuretés, dont juſqu'à préſent on n'a point cherché à priver les Pommes de terre ? Leur couleur verdâtre n'eſt point une raiſon pour les faire regarder comme plus dangereuſes que les épinards, l’oſeille, les olives. Il peut être utile de priver la Farine de Pommes de terre, de cette matière colorante, pour la rendre plus blanche & en faire un Pain plus beau, ſans que l’on doive pour cela les regarder comme nuiſibles à la ſanté, lorſqu'on les y aura laiſſées. Mr. Muſtel, dans ſon Mémoire ſur les Pommes de terre & ſur le Pain économique, qu'il a lu à la Société Royale d'Agriculture de Rouen, ne parle point de ces impuretés, & ne conſeille aucun lavage, quoique ſa manière de préparer la Farine de ces racines, diffère très-peu de celle que propoſe l’Auteur du Guide du Fermier.
Mais tandis que ce dernier Auteur avance que ſa Farine pré-