Page:Varenne - Bourdelle par lui-même.djvu/28

Cette page n’a pas encore été corrigée

toire surplombant le quai Montmurat et la rivière du Tarn « roulant ses eaux rougies par les limons des rives». À cette maison se lient les heures merveilleuses passées dans l’atelier paternel à écouter le chant du rabot, à voir le montage d’un meuble. « Mon abri d’enfant, mon toit, mes jouets et mon ciel intérieur, ce fut l’établi de mon père. » N’est-ce pas là qu’un jour s’enhardissant, étonné lui-même de son audace, le jeune Bourdelle obtint qu’on lui prêtât les outils avec lesquels il tailla dans le bois sa première œuvre de sculpteur, une « face du dieu des arbres» qui fit l’admiration des modestes artisans de l’atelier.

Montauban était, aussi bien que le Quercy, l’occasion d’inoubliables vagabondages « avec de fiers petits va-nu-pieds », Bourdelle se laissait emmener par eux, le dimanche, loin des concerts de musique militaire qui, faisaient les délices des familles bourgeoises, « aux ruisseaux vivants, aux bois paisibles, pleins de violette ». Il y trouvait « la liberté du ciel ».

Aux heures de tristesse ou de découragement enfin, l’enfant avait la consolation de trouver en sa mère « une aile tremblante et douce, l’aile de fleur d’une belle sensitive, toute rêveuse et tendre ». Il n’en a jamais parlé sans la plus profonde émotion.

Mais sans toi, c’est la nuit qui persiste,
Le ciel se serre, hélas ! sur mon tourment,
Le peu d’azur qui s’y traîne est si triste !