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vante, aussi belle, de la même qualité d’émotion et de beauté que les figures créées par son génie, simple, grande, heurtée souvent, méprisant la correction banale, parfois même l’orthographe, mais d’un merveilleux lyrisme, riche de pensées et d’images. Voici donc ses origines, telles qu’il en a gardé le souvenir le plus attendri :

« Quatre dieux m’ont tout enseigné. De mon père, le meublier-charpentier, tailleur de poutres en figures, j’acquis le sens de l’architecture. Devant les durs assemblages, je conçus mes tracés par les structures intérieures…

« D’un de mes oncles, l’Hercule tailleur de pierres, j’appris à écouter le roc, à composer tout droitement mes plans taillés et leurs tournants, en suivant les conseils de la pierre qui nous parle quand on la coupe.

« De mon aïeul maternel, tisserand, je compris enfin comment nouer serrées, comment faire valoir les couleurs dans les trames. »

Puis songeant à l’aïeul paternel qu’il accompagnait l’été avec ses troupeaux dans la montagne, il nous dit :

« Le sentier chevrier conduisit mes pensées capricieuses à s’appeler, à se tresser entre elles, diverses et groupées, comme le troupeau sur la route. La syrinx du meneur m’a enseigné le chant. »1

Tout le génie de Bourdelle est là en puissance. Il retient des leçons de son père la nécessité, même pour une sculpture, d’avoir pour point de départ une solide architecture intérieure. « Je crois bien que tailler le bois d’une huche, d’une table ou d’un escabeau est ce qui m’a le mieux appris l’équilibre de la