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trônait quelquefois, mais assez rarement, la belle madame Brébant, qui se tenait de préférence au premier étage, où elle était moins en vue. Le couple était bien connu du public des premières, dont il faisait partie obligée. Elle, majestueuse et parée, lui, le ventre opulent, le teint fleuri et l’œil gai sous ses cheveux blancs, clopinant allègrement, comme chez lui, au milieu des groupes, avec toujours l’air de jeter sa serviette sous le bras — son geste habituel — et de demander si on était satisfait du menu. Excellent homme, très aimé de tout le monde artiste, il avait mérité après Dinochau le surnom de « restaurateur des lettres ». Nombreux étaient ceux qui avaient déjeuné ou dîné de sa cuisine en ne le payant que de compliments et — pas toujours — de reconnaissance.

Aussi, à ce métier-là, n’avait-il pas amassé fortune et, vers la fin, lorsque sa vogue commença à décliner, dut-il s’estimer heureux de l’existence modeste que lui assurait la société qui reprit sa maison et l’avait conservé comme gérant. Mais c’en était fait de sa belle mine et de son ventre de prospérité. Quand, par hasard, on le rencontrait encore à une première, il n’était plus que l’ombre à demi-effacée de lui-même et il finit par disparaître sans bruit, à peu près oublié, après avoir connu la gloire d’être mis souvent à la