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En moins de rien, la pièce avait complètement changé d’aspect et l’on se trouvait tout étonné de la facilité avec laquelle cela avait été fait.

Du reste, il ne vint pas bien longtemps. Lesueur jouait le rôle d’un vieux maniaque que le moindre dérangement à ses habitudes mettait hors de lui : il lui était impossible de lire son journal si quelqu’un en avait enlevé la bande avant lui, de prendre une tasse de café s’il n’avait pas mis le sucre avant de verser le café, etc. Or, il était, comme on dit, si bien entré dans la peau du bonhomme, qu’il en était arrivé à prendre au naturel toutes les manies de son personnage et d’autres en plus. Un accessoire qu’il ne trouvait plus à sa place accoutumée l’empêchait de continuer à répéter, une chaise changée de côté lui faisait perdre le fil d’une scène. A la fin, Montigny, n’y tenant plus, nous déclara qu’il allait nous laisser continuer le travail sans lui.

— Je finirais par devenir maniaque à mon tour, nous dit-il. J’aime mieux ne plus venir.

Pareille chose s’était produite, à ce qu’on m’a conté, au Palais-Royal pour les Gens nerveux de Barrière et Sardou, où l’on était arrivé à grincer des dents et presque à se prendre aux cheveux pour tout de bon.