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jamais, car, dans ce genre de pièces, l’indisposition de l’étoile n’est considérée que comme une éventualité tout à fait improbable. Eh bien ! l’improbable se réalisa : un beau matin, Théo, retenue au lit par un gros rhume, fait prévenir qu’elle ne pourra pas chanter le soir. Grand désarroi au théâtre. Vite, on court chercher la doublure, on lit des raccords, on ajuste les costumes et voilà Granier en scène, sans avoir pu seulement se reconnaître. Elle avait grand’peur, la pauvre ! Qu’allait dire tout ce public venu pour entendre une diva en vogue et auquel on servait ainsi, sans préparation, une petite débutante inconnue ? Car on n’avait pas eu le temps de modifier les affiches, et il fallut se contenter d’une annonce.

D’abord, il ne dit rien, le public. Puisqu’on s’était dérangé, il fallait bien se résigner. Mais l’enthousiasme n’y était pas. L’ouverture et l’introduction furent plutôt mornes. A l’entrée de la nouvelle Rose Michon, on fut tout de suite intéressé par son air doux et craintif et sa grâce juvénile. Voyant qu’on ne lui voulait pas trop de mal, elle s’enhardit. On se mit à l’applaudir, un peu, puis beaucoup, puis davantage. A la fin de la soirée, tout le monde s’en mêlait : elle avait conquis la salle et gagné sa première bataille !