Page:Vanini-Oeuvres philosophiques, trad. Rousselot, 1842.djvu/186

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comme la matière première, qui n’est pas l’essence du cheval sous la forme du cheval, mais qui reste ce qu’elle était, une certaine substance dont l’adjonction à la forme produit l’être. Mais il y a autre chose dans l’acte de l’intelligence. Celle-ci en effet n’est pas une puissance pure, comme la matière prémière, qui produit l’être par son hymen avec la forme ; mais elle est notre forme substantielle, séparable, incorruptible, éternelle, de laquelle, comme d’un sujet essentiellement parfait et de l’espèce qu’elle reçoit, se forme l’entendement, qui reste toujours lui, si ce n’est que Jules César en s’instruisant devient différent de lui-même par suite de notions accidentelles. Car si l’intelligence est la forme de l’homme (et il faut en convenir), et si par la notion qu’elle a d’un cheval elle devenait cheval, il en serait de même pour l’homme ; or l’intelligence contient l’image, mais elle n’est pas l’image elle-même. Je croyais d’abord que Cardan voulait dire que l’intelligence était comme colorée par la forme du cheval, mais il entend bien parler de l’entité réelle, car à la fin du livre XIV il dit : « L’intelligence est entièrement séparée du corps, car elle est la pensée que j’écris maintenant et qu’on lira ; quand je m’occupe de matières médicales, elle est la médecine ; quand j’écrivais sur les nombres, elle était un nombre : en sorte qu’il doit arriver, ainsi qu’à ceux qui ont écrit différentes choses, qu’en me relisant, je me paraisse avoir été différent de ce que je suis alors. » Voyez comme il parle avec vérité du changement de la substance, et aussi de la différence et de l’identité. Troisième raison : « En quoi ces pensées écrites diffèrent-elles de mon intelligence?» En un point très-important; cet écrit est un fait individuel, et notre intelligence est une forme générale. Quatrième raison : « Celui qui lira ces pensées après deux mille ans, verra mon intelligence et se l’appropriera ; c’est là ce qui constitue pour chacun, non l’éternité, mais la perpétuité de l’intelligence. » Quel poison, quel dogme pernicieux tu jettes à la foule ignorante ! Ainsi l’intelligence n’est pas une