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CHAPITRE IV

LE COMMERCE AU CONGO ET LES SOCIÉTÉS PRIVÉES


Le monopole, quelle que soit sa forme, est une taxe levée sur ceux qui travaillent au profit de la fainéantise, sinon de la rapacité.
Stuart Mill.


Si rigoureuse qu’ait été la conception domaniale de l’État du Congo, elle n’a pu aller jusqu’à refuser aux indigènes la jouissance de produits qu’ils utilisent depuis longtemps comme objets de consommation ou d’échange, tels que les fruits du palmier élaïs. Dans le Mayumbe, par exemple, où les palmiers fournissent aux habitants des matériaux de construction pour leurs huttes, de l’huile de palme pour leur cuisine, du vin de palme (malafu) pour leurs fêtes, de l’huile ou des amandes pour leurs échanges, la concession de terres, en pleine propriété, à des planteurs de cacao, n’empêche pas que ces derniers laissent aux gens des villages le droit d’exploiter, pour leur compte, les palmiers qui se trouvent sur leur domaine[1].

Comme je demandais un jour à l’un d’eux pourquoi il ne se déclarait pas propriétaire de ces palmiers comme l’État se déclarait propriétaire des lianes à caoutchouc : « Je m’en garderais bien — répondit il — car, indépendamment de toutes autres considérations d’ordre plus élevé, si je faisais cette sottise, j’éloignerais ma main-d’œuvre, qui s’empresserait de

  1. Il a été exporté du Bas Congo en 1908, 2.102.673 kilog. d’huile et 3.627.613 kilog. d’amandes. Depuis quelques années, la production reste stationnaire, en grande partie à cause de la défectuosité des moyens de communication. Voir Annexe au Bulletin officiel du Congo belge du 6 mai 1910. Le commerce dans le district du Bas Congo (zone de Boma).