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lutisme politique et économique, qui va plonger les populations du Congo dans un abîme d’indicibles souffrances.

Tout ce régime, au surplus, se fonde sur deux idées très simples, qu’il importe de mettre eu relief pour se retrouver au milieu de l’excessive complication des décrets ou des ordonnances que nous analyserons par la suite.

Dans tous les pays où existe un gouvernement, c’est un principe généralement admis que l’État, en vertu de sa souveraineté, a le droit de se procurer des ressources au moyen de l’impôt et, d’autre part, d’incorporer dans son domaine les biens sans maîtres, et notamment les terres vacantes.

Mais au Congo, où l’argent n’existait guère, il ne pouvait être question que d’impôts en travail ou en nature ; et, d’autre part, la propriété foncière individuelle étant à peu près inconnue, il suffisait, pour exproprier la presque totalité du territoire, de considérer comme vacantes toutes les terres qui n’étaient pas occupées par des villages ou des cultures.

C’est ce que fit le Souverain du Congo.

Sous prétexte de vacance des terres, il se déclara propriétaire de tout le pays ; et, de ce droit de propriété, il tira cette conséquence que, maître du sol, il pouvait en interdire l’accès aux commerçants, en disposer au profit de Compagnies concessionnaires, en recueillir même les produits, sauf à payer aux indigènes le salaire de leur main-d’œuvre.

Mais, dans ces conditions, toute concurrence faisant défaut, la rémunération ne pouvait être que dérisoire : tellement dérisoire que, la plupart du temps, les indigènes se refusaient à travailler pour si peu.

C’est alors que l’on faisait intervenir la notion de l’impôt.

Puisque tout État a le droit d’exiger l’impôt, et qu’il n’y avait au Congo d’autre impôt possible que l’impôt en travail, on obligea les noirs à travailler pour l’État, ou pour les Compagnies auxquelles il déléguait ses pouvoirs.

Les « contribuables » durent faire du pagayage, du portage, des corvées pour les travaux publics, fournir des vivres,