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§ 2. — Le domaine éminent de l’État


Il faut respecter, ou restaurer, intégralement, les droits des communautés indigènes sur le sol qu’elles occupent : tel est notre principe fondamental. Mais, hâtons-nous de l’ajouter, ce serait aller à l’encontre de l’intérêt même de ces communautés que d’appliquer ces principes d’une manière absolue, et les inconvénients, les dangers, les abus du système domanial et de l’exploitation en régie ne doivent pas nous faire oublier les inconvénients, les dangers, les abus qui ne manqueraient pas de se produire, si on leur abandonnait, sans réserves, le droit de disposer comme elles l’entendent du sol et des produits du sol.

Pas plus en Afrique qu’en Europe, nous ne sommes partisans du laisser faire, et, spécialement dans la matière qui nous occupe, le laisser faire produit des conséquences déplorables, qu’il s’agisse des aliénations de terres, de l’exploitation des forêts ou des transactions commerciales entre indigènes et européens.

1. Les aliénations de terres. — Étant donnée la faible densité des populations dans la plupart des contrées de l’Afrique tropicale, les indigènes, ayant à suffisance des emplacements pour leurs villages et leurs cultures, n’attachent que peu ou pas de valeur aux terres qu’ils n’occupent pas actuellement. Aussi sont-ils généralement, ou plus exactement, leurs chefs sont-ils disposés à en faire l’abandon, pour quelques pièces de cotonnade ou quelques gallons d’eau-de-vie, sans se préoccuper le moins du monde de la valeur virtuelle du sol qu’ils aliènent ainsi. Ne fût-ce qu’à ce point de vue, déjà, il est nécessaire que l’État intervienne, comme il intervient dans nos pays pour tout ce qui concerne l’aliénation des biens appartenant à des mineurs ou à des administrations communales.

2. L’exploitation des forêts. — On a reproché souvent au