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voir, dans la suite, aliéner des terres domaniales, à titre onéreux, ou à titre gratuit, au profit d’individus ou de communautés, indigènes ou non indigènes, donner ces biens domaniaux en location ou concéder des droits de jouissance exclusive, sans grever les futurs propriétaires ou occupants de l’obligation de respecter le droit de cueillette[1].

Bref, après comme avant le décret du 22 mars, l’État prétend être propriétaire de presque tout le Congo. Les indigènes, au point de vue foncier, n’ont droit qu’aux terres qui leur sont laissées ou assignées pour leurs cultures et pour leurs villages. Le surplus du territoire continue à être considéré comme « terres vacantes » et, pour affirmer son droit sur ces terres, le gouvernement prélève une taxe domaniale sur chaque kilogramme de caoutchouc qu’on y récolte.

Le taux de cette taxe a été critiqué, comme excessif, par l’un des membres du Conseil colonial, M. Morisseaux, ancien directeur de la Compagnie à charte du Mozambique :

La lourdeur uniforme de cet impôt — disait-il à la séance du 12 mars 1910[1] — m’inquiète à plusieurs points de vue. Elle me fait craindre qu’il ne soit pas facile de réaliser la réforme qui nous est chère : de transformer le paiement de l’impôt en nature, en paiement en espèces ; que le noir ne trouve pas toujours un stimulant suffisant au travail dans la marge de profit qui lui est laissée et que, dès lors, il se laisse aller a sa propension naturelle pour la paresse ; qu’il ne se produise un resserrement de la production du caoutchouc et une diminution notable de ressources pour la Colonie.

À plusieurs de mes collègues, comme à moi-même, la taxe de fr. 75 parait trop exclusivement basée sur les prix qui ont cours actuellement. La taxation devrait permettre un certain jeu. Elle devrait pouvoir être réduite ou même supprimée quand le caoutchouc descend au-dessous d’un certain prix[2].

Ces observations, qui ne tendaient à rien moins que de mettre en doute l’efficacité des réformes projetées, furent assez mal accueillies par la majorité du Conseil.

M. Renkin répondit que la taxe était modérée, si l’on tenait

  1. a et b Conseil colonial. Compte rendu analytique, 1910, p. 325.
  2. Conseil colonial. Compte rendu analytique, 1910, p. 288.