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C’était un beau soir de dimanche,
À l’heure calme où tout s’endort.
Elle avait mis sa robe blanche,
Et dénoué ses cheveux d’or.

Elle disait son Notre Père,
Sous les pommiers d’un grand verger,
Quand survint la belle panthère
Qui devait toute la manger.

C’était au mois où l’air scintille,
Où les vergers sont embaumés,
Où l’âme des petites filles
Est peinte en rose. C’était en mai.

La panthère, qui n’était pas méchante,
Pour ne pas effrayer l’enfant,
Prit une mine souriante,
Et s’approcha très doucement.

Lorsque des enfants voient des chats,
Et tout ce qui leur ressemble ici-bas,
Ils rient, car ce sont des êtres étrange ;
Et la petite fille rit aux anges.

Lors, pour ne pas brusquer les choses,
L’aimable panthère s’assit,
Dévotement, d’un air confit,
Avec sa queue entre les roses.

Sa robe était d’un noir de jais,
Ses beaux yeux ronds d’un vert de jade,
Elle restait là sans bouger,
Comme une sœur près d’un malade.

Ô sœur, lui dit l’enfant, ô sœur noire
Tu dois savoir de belles histoires,
Des histoires du temps jadis,
Où tu vivais au Paradis ;

Du temps de notre grand’mère Eve,