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LES POÈTES DU TERROIR

Ni les vents mugissants, ni la mer en fureur,
Ni le tonnerre en feu, n’ont pour vous de terreur.
Vous avez vu cent fois au granit de vos côtes
Se heurter, en hurlant, les vagues les plus hautes ;
Et qu’est-il résulté de tant d’orgueilleux chocs,
Sinon un peu d’écume au sommet de vos rocs ?
Leurs massifs éternels, gardant la même forme,
Bravent tous les assauts de l’Océan énorme ;
Et l’Océan vaincu, furieux, rugissant.
Se tord de désespoir de se voir impuissant.

Or, les Bretons, témoins de ces jeux redoutables,
Sont, comme leurs rochers, devenus indomptables.
Lorsque les éléments mêlent, dans leurs complots,
Les colères de l’air aux colères des flots,
Si le pêcheur breton croit, parfois, que l’orage
Peut dépasser sa force et non pas son courage,
Il rentre en sa cabane et, fermant les volets,
11 répare, en sifflant, les trous de ses filets,
Pendant que, dans un coin, ses filles et leur mère
Pour quelque cher absent disent une prière,
Et s’il tonne trop fort, font à sainte Anne un vœu…

(Jeanne de Belleville, 1872.)