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sa gaîté d’esprit « conficte en mespris des choses fortuites[1]. »

C’était aussi fort circonspect dans un siècle où l’on brûla vifs à Paris pour sa sévérité de principes le vertueux Berquin, et pour sa polémique ouverte, un savant plubliciste et imprimeur, Étienne Dolet, le grand Cicéronien. Il ne lui était pas possible d’imiter Aristophane même dans son Plutus, et d’attaquer, sous des noms fictifs, les hommes de son temps. Ce qu’il pouvait faire de plus hardi pour l’époque, c’était de ridiculiser les abus et les sottises avec une verve comparable à celle du Comique grec, mais qu’il avait soin de déguiser sous la livrée de la folie. En jouant le rôle d’un Triboulet, Rabelais comptait donc sur ses facéties d’abord pour être lu, ensuite pour ne pas être inquiété, surtout au sujet de ses libres opinions sur les questions et la discipline ecclésiastiques ; ce qui même ne l’eût pas toujours préservé des rigueurs de la Sorbonne, s’il n’eût eu la protection de François Ier, lorsqu’il crut pouvoir, sans danger, en se faisant connaître, se départir quelque peu

  1. Pantagruel. Prologue du livre IV.