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bonne direction de son précepteur Épistémon, une instruction plus étendue et plus scientifique que celle de son père. Ainsi le veut le progrès.

L’élite d’une génération élevée de cette manière doit former une société instruite, forte et honnête dont Rabelais se plaît à faire une fine et divertissante description dans son Abbaye de Theleme[1], d’où il exclut les vieux matagotz, les boursouflez, les torcoulx, les basochiens, mangeurs du populaire, les grippeminaulx, les briffaulx, les hypocrites, les bigotz, les badaulx, en somme tous ceux dont les abus méchants rempliraient l’abbaye de méchancetés, et où il ne reçoit que les gens de bonne naissance, d’un esprit cultivé, de mœurs vertueuses, ayant la volonté de bien faire et capables de s’aimer toujours ; il y admet aussi les vrais serviteurs de Dieu qui passent leur pieuse existence à prêcher le saint Évangile ; car dans ce séjour d’honneur il veut fonder « la foi profonde[2]. » Mais quelle est cette foi ? Est-ce une foi irrationnelle, sans fondement réel ? Non ; elle est logique et positive : « c’est, comme le dit un éminent criti-

  1. Volonté.
  2. Gargantua. Chapitre LIV.