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— Abandonner mon théâtre ? m’écriai-je.

— Voulez-vous partir avec moi ? répéta-t-il ; nous irons où vous voudrez. Mais je veux vous arracher à votre vie actuelle, je veux que personne de ceux qui vous connaissent ne puisse sourire en vous voyant à mon bras.

Ces paroles, dites avec fermeté, furent comme des paroles magiques.

En un instant je repassai en moi-même mon existence folle, compromettante à plaisir, ma vie de bohème, et l’opinion qu’avaient de moi le monde et mes camarades.

Je jetai un cri.

— En effet, dis-je ; on croit que je suis une fille perdue !

Et je courus fiévreusement à lui, comme si lui seul pouvait me défendre contre cette pensée terrible. Il m’accueillit avec empressement.

— Je ne le crois pas, moi, dit-il doucement.

Je me reculai et lui pris la main.

— Vous êtes bon, vous, lui dis-je… Quand partons-nous ?