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LES IRRÉGULIERS DE PARIS.

cellier et sa basse-cour étaient les corridors de la députation.

Il fut, pour son malheur, un des délégués de la Charente-Inférieure, chargés de féliciter le Prince. L’aide de camp général Roguet les reçut sur le pont de la frégate-école, où Poupelin le harangua.

Il n’a pas voulu me dicter son discours ni la réponse qu’on y fit ; mais, quand il raconte cette entrevue, c’est toujours à la première personne qu’il parle, se déplaçant, faisant les gestes, changeant la voix. On dirait qu’il lit une tragédie.

« Général ?

— Bon Charentais ?

— Laissez un Cognaçais vous dire…

— Jeune homme, exprimez-vous ! »

Le général fut aimable comme toujours, et félicita vivement l’orateur, l’assura de la reconnaissance du Président, manifesta l’espérance qu’on se reverrait, etc., etc. On se quitta.

Poupelin rentra chez lui. Il songea quelque temps à son coteau natal, se rappela les bonnes heures passées dans ses vignes, sous le soleil qui l’avait vu naître ; mais le citoyen l’emporta sur l’homme et il écrivit à Cognac.

Il écrivit qu’on ne devait pas compter sur son retour. Le soin de la chose publique le retenait ici, près de l’Élysée. Mais on pouvait être sûr qu’il n’oublierait pas le village où il avait joué enfant, et que ses sympathies les meilleures étaient toujours acquises à cette Charente où il avait grandi (pas trop).