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LE BACHELIER GÉANT.

Fouille-au-Pot, fut-il le remède et la consolation ! Je me souvins que j’avais une fille devant le cadavre de cette enfant.

Je ne pouvais plus rester dans le pays, et la troupe d’ailleurs ne tenait point à me garder. Cet événement terrible pesait sur nous. On se quitta.

Rosita, je dois le dire, se montra douce, aimante, dévouée ; elle trouva pour me consoler des paroles pleines de tendresse, et c’est hélas ! à ce moment pénible que se rattachent mes plus doux et plus chers souvenirs.

J’oubliai l’accident, dont le hasard était seul coupable. Le hasard ? Mais si je n’avais pas quitté ma mère et craint de la revoir, mon bras n’aurait pas tremblé et le poids n’eût pas tué l’enfant…

N’importe ? au feu de la passion mes remords se fondaient, et j’acceptai bravement, sans trop de honte, les aventures misérables par lesquelles il me fallut passer.

Je mangeai des cailloux, du feu ; je bus le plomb fondu jusqu’à la lie.

J’entrais dans un four brûlant avec deux poulets crus, et j’en sortais, les poulets cuits.

Je me passais des barres de fer rouge sur la langue, et j’allumais un punch dans le creux de ma main.

— Vous aviez un secret ?

— Oui et non : n’importe qui, sans préparation, peut tremper sa main dans le métal mis en fusion ; quelquefois il faut s’enduire d’alun. Cela ne coûte