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LES VICTIMES DU LIVRE.

comme cela de par le monde un autre monde où les duchesses vous sautaient au cou, les rubans rouges à la boutonnière, où les millions tombaient tout ficelés et les grandeurs toutes rôties, et qu’il suffisait de ne croire à rien pour arriver à tout…

Monde de filous et d’entretenus.

Dans l’ombre, au second plan, la Vieille fille, les Deux Frères, les chefs-d’œuvre.

Au soleil, le sermon de Vautrin, coupé par le célèbre jet de salive ! Et les pauvres garçons d’en faire un évangile, crachant comme lui, en homme supérieur (voyez la page), au nez de la société, qui les a laissés s’embarrasser dans leurs ficelles et tomber — de ces chutes dont quelquefois on porte la marque sur l’épaule.

Les grands hommes de province à Paris ! — J’ai vu s’en aller un à un, fil par fil, leurs cheveux et leurs espérances, et le chagrin venir, quelquefois même le châtiment — en voiture jaune, au galop des gendarmes. Qu’on en a reconduit de brigade en brigade, de ces Illusions perdues !

Les plus heureux, je vous les nommerai un jour, jouent au La Palférine dans les escaliers de ministère, les antichambres de financiers, les cafés de gens de lettres, et font des mots, n’ayant pas pu faire autre chose. Ils attendent l’heure de l’absinthe, après avoir laissé passer celle du succès.