Page:Vallès - Le Bachelier.djvu/82

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sait, c’était clair et c’était chaud. Je partais quelquefois dans ma chambre avec du Michelet, comme on va se chauffer près d’un feu de sarment.

Quelquefois aussi, quand il parlait, il avait des jets de flamme, qui me passaient comme une chaleur de brasier, sur le front. Il m’envoyait de la lumière comme un miroir vous envoie du soleil à la face. Mais souvent, bien souvent, il tisonnait trop et voulait faire trop d’étincelles : cela soulevait un nuage de cendres.

Cendres ou étincelles, les idolâtres saluaient tout.

À moi, il me semble que ce n’est pas honnête et que c’est hypocrite de mentir pour rien ; de s’aveugler et d’aveugler ainsi le maître. Ce n’est pas la peine de crier contre les jésuites.

Quelle belle tête tout de même, et quel œil plein de feu ! Cette face osseuse et fine, solide comme un buste de marbre et mobile comme un visage de femme, ces cheveux à la soldat mais couleur d’argent, cette voix timbrée, la phrase si moderne, l’air si vivant !

Il a contre le passé des hardiesses à la Camille Desmoulins ; il a contre les prêtres des gestes qui arrachent le morceau ; il égratigne le ciel de sa main blanche.


Les journaux s’en sont mêlés, on a reproduit des passages de quelques leçons — passages à mine ridicule. Le professeur a protesté, il a rebouté les citations, refait le nez de ses phrases.

Pourquoi ?