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dans l’esprit, et j’ai dit Monsieur, Monsieur Bonardel, comme si je lisais mon enveloppe.

Il ne bouge pas. Il croit que je lui écris une lettre, il attend sans doute que je la lui remette.

Je recommence, en précisant :

« Monsieur Bonardel, rue du Colysée, 28… »

J’espère qu’il n’y a pas à s’y tromper et que je prends bien mes précautions !

C’est toujours le souvenir de l’enveloppe !

M. Bonardel a-t-il été frappé de mon insistance à mettre les points sur les i ? Reconnaît-il là des habitudes de commerce vraiment sérieuses et toujours utiles ? — Probablement, car, se tournant de mon côté :

« Monsieur Vingtras…, fait-il avec un geste de lapin de plâtre.

— 13, rue Saint-Jacques ! »

M. Bonardel s’incline.

Nous sommes bien les deux hommes en question. Pas de surprise !

Et maintenant, qu’est-ce que je veux ? L’œil de M. Bonardel, rue du Colysée, 28, demande à M. Vingtras, 13, rue Saint-Jacques, de quoi il s’agit.

Ce n’est pas sans doute pour faire rouler mon chapeau et lui lire des enveloppes que je suis venu.

Il faut s’expliquer.

« Monsieur, je suis jeune… »

J’ai dit cela très haut, comme si je faisais un aveu qui me coûtât ; comme si d’autre part, j’en avais pris mon parti carrément.