Où irai-je finir ma journée ?
On donne Paillasse à l’Ambigu. Va pour Paillasse !
Sacrebleu, c’est beau, la scène où Paillasse dit, en s’évanouissant : j’ai faim ! — C’est beau, l’acte de la maison vide, la femme partie, les enfants qu’il faut faire souper, le coup de couteau dans le cœur, le coup de couteau dans le gros pain !
En sortant, je suis allé m’asseoir à l’Estaminet des Mousquetaires, plein d’hommes de lettres, plein de comédiens, plein de femmes encore !
J’emporte avec moi, rue des Cordiers, un monde de sensations douces et fortes.
Est-ce le vent de la nuit qui secoue mes cheveux sur mon cou ? Est-ce l’émotion de ces heures si saines ?
Je ne sais ! — mais j’ai un frisson qui me va jusqu’au cœur : frisson de froid ou frisson d’orgueil.
Le ciel est clair et dur comme une plaque d’acier…
Quelques jupons éclairent de blanc les trottoirs ; on voit à cent pas devant soi… mon ombre s’allonge aux rayons de la lune et emplit toute la chaussée…
Il s’agit de me faire une place aussi large au soleil !