réunir ! » dit Matoussaint se levant tout d’un coup.
Il est malheureusement à côté de Championnet, qui tient la bouche ouverte depuis l’après-midi à cause du mal que lui a fait l’épingle ; Matoussaint le heurte avec son coude. Championnet referme la bouche précipitamment et se mord la langue. Il ne pourra que voter — mais pas parler. — Il lui est défendu de parler !
« C’est moi qui ai pris l’initiative d’une convocation, citoyens, reprend Matoussaint : convocation nécessaire, je crois, au salut de la Révolution…
— Oui, oui, » disent tous ceux qui peuvent parler (pas Championnet).
« Je vous propose, au nom de l’Une et Indivisible, de nous constituer en Comité secret, et je demande qu’on lui donne, dès à présent, un nom ! »
Personne ne dit mot pendant un moment, enfin quelqu’un crie :
« Le Comité des Jeunes…
— Oui, oui ! le Comité des Jeunes !…
— Silence ! fait Matoussaint avec un geste et une voix de vieux de la montagne ; sachons bien que nous nous appelons le Comité des Jeunes, mais sachons-le seuls ! Que nul sur terre ne nous connaisse ! Ne nous révélons que le jour où nous déploierons notre bannière dans la bataille, où nous écrirons ce nom, tout du long, avec du sang, sur une guenille de drap noir.
— Pourquoi une guenille ? »
On me fait taire et Matoussaint reprend, avec une modestie digne des temps antiques :