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mou que soit mon pas, insultent leur menton glabre, leur regard louche, leur traînement de semelles sur les dalles.

Ne pouvant me reprocher d’être inexact ou ivrogne, ils ont eu une idée de génie, les jésuites !

Ils ont fait organiser, en dessous, une conspiration contre moi.


Minuit.

Le dortoir, où je piochais à la chandelle, est devenu le terrain d’embuscade des complotiers.

Il prête à l’émeute par sa construction monacale. Chaque frère avait jadis une cellule à ciel ouvert, chaque élève a maintenant la sienne, si bien que l’on ne voit personne de l’intérieur des boxes ; le maître d’étude entend les bruits, mais ne peut distinguer les gestes.


Un beau soir, il y a eu insurrection entre ces murs de bois : tapage contre les cloisons, sifflets, grognements, cris, et si drôles que, ma foi, j’ai voulu m’en mêler.

Et j’ai, moi aussi, cogné, sifflé, grogné et crié avec des notes aiguës de soprano :

— À bas le pion !

C’est ma première heure vivante depuis mon entrée ici.

Je suis là, en chemise, au milieu de la cellule, cognant le chandelier contre le pot de chambre, fai-