Page:Vallès - L’Insurgé.djvu/154

Cette page a été validée par deux contributeurs.

rais, paraît-il. J’ai, à la salle Desnoyers, la réputation d’un homme qui ne ferait pas « comme nos pères », qui reculerait devant les grands moyens, qui, au troisième tombereau, dirait à l’exécuteur d’aller casser une croûte et boire une chopine.

Mais Ducasse ferait « comme nos pères », lui, et apporterait en personne le déjeuner sur l’échafaud, pour qu’il n’y eût pas de temps perdu.


— Oui, citoyens, je n’aurai vraiment rempli mes devoirs civiques, je ne me croirai digne de mon titre auguste de révolutionnaire que le jour où j’aurai, de ma propre main, fait faire couic à un aristocrate.

Et il fait couic, d’abord avec un geste de polichinelle rigoleur — le peuple aime la grimace burlesque et hardie — puis avec la majesté d’un tueur de Stuart ou de Capet, qui tire son épée au clair, l’abat sur un cou royal, et fait sauter une tête jusqu’alors inviolable et sacrée.

Il lichotte le couteau de la guillotine avec sa langue ; il en repasse le fil contre l’eustache d’une éloquence sanguinaire et farceuse ; il se pend, en riant, à la ficelle, comme un singe s’accrochant par la queue au cordon de sonnette du bourreau.


11 heures du soir.

Oui, certes, tout ce qu’il fallait dire a été dit ! Je viens de sentir qu’il était un parti inconnu qui mi-