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Ç’a été une grande minute ! Seul ! J’avais osé venir seul ! — Jamais je n’ai été fier de moi comme en ce jour d’immense humiliation.


Une autre fois encore, cependant, j’ai eu un revenez-y d’orgueil, à la sortie d’une réunion où, l’un après l’autre, le glorieux et moi, nous avions parlé à la foule.

J’entendis un de ceux du comité dire, en me désignant :

— Ça saura se faire écouter de la canaille…


Enfin, la corvée est finie, la période électorale est close ! Je suis libre !

Il y a là-bas, du côté de Chaville, une ferme où j’ai passé des journées calmes et heureuses à regarder battre le blé, courir les canards vers la mare, à boire du petit vin blanc sous un grand chêne ombreux, et à faire la sieste dans l’herbe coupée, près des pommiers en fleur.

J’ai soif de silence et de paix. Je suis allé là — oubliant le vote des sections dans Paris, me roulant sur le foin, écoutant les rainettes qui chantaient dans les roseaux verts. Et, le soir, je me suis endormi entre des draps de toile bise et dure comme ceux où me fourraient mes cousines au village.


Au village !

Ah ! j’étais plutôt fait pour être un paysan qu’un